
Septembre 1973, ex. unique.
– 100 p. ; 20 x 16 x 6 cm ; (ø) – album de cartes postales ; cases de comics érotique découpées ; texte autographe, écriture cursive, mine de graphite sur papier ivoire.
– couv. deux cuirs bordeaux ; 50 planches, papier fort gris avec encoches.
Fonds Ghérasim Luca, donation Micheline Catti ; inv. n° 096 23.
Détails
Album de cartes postales de 50 planches de papier fort gris, deux encoches à chaque coin.
Couverture deux cuirs, grain fin (mors et coins premier plat, mors deuxième plat) et cuir épais, bordeaux, pour le reste des plats, bon état ; inscription dorée «cartes postales» sur le premier plat ; présence irrégulière d’octogones noirs, collés au coin supérieur droit de certaines pages, dont un des coins est plastifié.
Textes autographes à la mine de graphite sur papier ivoire de grammage moyen, 14 x 9 cm, écriture cursive, feuillets insérés dans les encoches.
Vignettes de comics extraites de Bikini Cat, «Du sang sur la mer», Paris, Ed. de Poche, 13 x 18 cm, 128 pages, n°5, août 1972 (noir et blanc, érotique/science-fiction, vignettes découpées au format 12,8 x 9 cm, toujours un bord déchiré grossièrement, et insérées dans deux encoches sur quatre, par-dessus les feuillets manuscrits, soulevables pour lire le texte).
Présence irrégulière de feuillets de Canson Montgolfier-Canson (Davézieux et Annonay), noir, texturé et filigrané, insérées dans les ajours, sans inscriptions, marquant des coupures dans l’album.
Daté et localisé à la mine de graphite sur les deux contreplats.
Daté aux deux contreplats, cachant les textes sous les vignettes, mélangeant la trame du comics comme celle des textes originaux, tout l’album point du lit-tige est fait pour contredire les habitudes de lecture, mêler des rythmes et marier des espaces distincts.





Transcription
(numéros de pages entre parenthèses ; notation « [] » quand un carré noir est collé dans un des angles)
«[sur le premier contre-plat :] Paris, septembre 1973 /// point de lit-tige (1) [non couvert] /// lit vrai / cause de grands ravages (2) /// lit-dé (3) /// lit légale / contraire à la loi / lit moral / contraire à la morale (4) [] /// commun dans les marais / lit-vie / tirant sur le noir / lit-vide (5) [non couvert] /// lit muable / n’est point sujet à changer / lit mortel / n’est point sujet à la mort (6) /// lit-monde / sale et impur (7) /// point de / lit-tige (8) /// lit réel / n’est pas réel / lit réalisable / n’est pas réalisable (9) /// [page vide, non couverte] /// Personne à qui pouvoir dire que je n’ai rien à dire (11) [non couvert] /// et que le rien que je me dis continuellement (12) /// je me le dis comme si je ne me disais rien (13) /// comme si personne ne me disait (14) /// même pas moi (15) [] /// lit respirable / lit responsable / lit mobile (16) [non couvert] /// lit-lit mi-table (17) /// que je n’ai rien à dire (18) /// qui est une façon de dire que je ne fais rien (19) /// une façon de ne rien faire et de dire ce que je fais (20) /// Personne à qui pouvoir dire / que je ne fais rien (21) /// personne à qui pouvoir dire que je n’ai rien à faire (22) /// c’est à dire rien (23) /// même pas à moi (24) /// étaient comme aveuglés / par des larmes secrètes et des gémissements / saccadés sortaient de leurs orbites (25) /// Quant au long regard (26) [] /// subissent un traitement plus doux (27) [] /// boisson acide / substance simple : / lit-monade (28) [] [non couvert] /// et / lit-mage (29) [] [non couvert] /// il n’arrive presque jamais à pénétrer / dans l’œil de l’idée (30) /// il n’y a d’ailleurs rien / pour l’y attirer (31) /// eux qui normalement se laissaient fascinér / toute de suite (32) /// ce qui vaut mieux (33) /// que d’être retenu à vie (34) /// seuls le voyageurs à courte vue (35) /// au bout d’une demi-heure (36) /// et on les laissent se retirer (37) /// en dépit des choses plutôt rudes à l’entrée (38) [non couvert] /// C’est l’acte de cesser de regarder / qui déclanche le mécanisme de la libération (39) [non couvert] /// et s’il se produit le moindre contre-temps / l’œil de l’idée ne s’ouvrira plus (40) /// mais les voyoux ne procèdent pas toujours / progressivement (41) /// mais il dégageait une lueur masquée (42) /// Son œil était privé de lumière (43) /// On trouve pour certains un exemple / de long emprisonnement (44) /// [page vide, canson noir] /// qui attirait (46) /// L’idée que j’ai vu était ainsi (47) /// Ils ont pour ce faire / à descendre le long du clignotement / par les deux cercles de rides raides / qui poussent inclinés vers le bas (48) [] /// Les regards peuvent passer en pressant / contre les extrêmités plus flexibles / mais il leur est impossible de revenir en arrière . car ces extrêmités ne sont inclinées que d’un côté (49) [] /// On comprendra que ce soit là un exemple / extrême, à perte de vue [non recouvert] /// et tandis que pris de panique / ils font des efforts pour sortir [deux comics insérés} [] /// Ils se trouvent alors dans une petite chambre / au milieu de la vision même (52) /// ils se couvrent d’images (53) /// [double page vide, Canson noir] [] [] /// Etant donné que la barrière en haut / ne peut être franchie / il leur faut descendre / à travers la seconde zone de cils / disposé de la même façon que la première (56) [] /// à l’intérieur de l’idée (57) /// [double page Canson noir, case de couteau lancé] /// Il n’y avait pas beaucoup d’espace (60) [] /// le seul moyen d’y parvenir / étant de n’y plus penser (61) [] /// C’est sans doute la raison pour laquelle / j’ai pu voir mon regard ramper / dans toutes les directions à la fois (62) [] /// Il fait plus clair au sommet / là où les extrêmités des paupières / sont repliées sur elles-mêmes (63) [] /// À peine aspiré au fond de l’œil / mon regard entreprit de se frayer / un chemin vers le haut (64) /// obstruant encore plus la lourde trappe mentale (65) /// entrainant le regard du penseur (66) /// le font se retirer à l’intérieur / comme mû par un ressort (67) /// ou un minuscule battement de cœur (68) /// Même le souffle d’une pensée (69) /// L’irritabilité en fut extrême (70) /// On ne s’attendait certes pas / mais c’est pourtant à cet endroit / que s’est posé naturellement mon regard / car il n’y a pas d’autre voie pour y pénétrer (71) /// L’acte de regarder s’accomplit à l’intérieur / de manière fugitive et constante (72) [] /// et lorsqu’il s’accomplit / ne fait que s’avancer entre les fourchettes (73) [] /// Il semble également en veilleuse / car il ne s’ouvre que rarement (74) [] /// Ainsi tout l’œil de l’idée se présente / dans la position inverse du regard (75) [] /// La prunelle enchapuchonnée s’appuie sur elles (76) /// C’étaient les extrêmités effilées de celle-ci / que j’avais pris pour les antennes / d’une sauterelle (77) [] /// de manière à former comme une fourchette / dressée en l’air (78) [] /// Deux paupières latérales sont réunies / sur la moitié de leur longueur (79) /// en sorte qu’elle se trouve tout contre / la paupière supérieure / et lui est partiellement accolée (80) [] /// est inclinée en arrière, à la base, (81) [] /// la paupière du milieu, car elle en a plusieurs, [non couvert] [] /// [page vide] [] /// Elles ne sont pas égarantes, au contraire, (84) /// et reconnus comme une de ces idées à capuchon vert / qui prennent les hommes au dépourvu (85) /// Je me penchais, alors, (86) /// mais à cause de ses yeux longs et minces / que j’ai pris pour des antennes de sauterelle (87) /// d’une indistinction certaine (88) /// [page vide, canson noir] [] /// [double page vide, Canson noir] /// non pas pour la beauté de sa démarche (92) /// Une d’entre elles attira notamment mon attention (93) /// Je faillis ne pas les apercevoir / tant elles étaient creuses au milieu d’oublis / et de vertiges sans nom (94) /// au vol de mes distractions (95) /// qu’il eût été dommage de ne pas saisir (96) /// plane un petit nombre d’idées / très particulières (97) /// à une altitude de nul pied (98) /// et, tout en grimpant, est enduit / d’un fluide léger que ses mouvements / secrètent abondamment (99) /// [page vide] /// [sur le dernier contreplat :] Paris, septembre 73»
Références
«LIT IVRE», Paralipomènes (éd, Le Soleil Noir, 1976, p. 41) mêmes phrases mais dans le désordre et parfois répétées.
«LES CRIS VAINS», Paralipomènes (p. 33), même texte sauf passage de la première du singulier (dans la présente version) à la première du pluriel (dans les édition du Soleil Noir) : intéressant de voir que dans la version de «LES CRIS VAINS» restituée dans l’album éponyme (1960-1963), le texte est le même que dans la version du Soleil Noir (1977), publiée après l’écriture de la présente version du texte (1973).
Le texte «DROIT DE REGARD SUR LES IDÉES», Paralipomènes (p. 9-18) habille la majorité des pages de l’album : p. 30 à 99, mais dans le désordre, parfois par petites suites, dans le sens de la lecture ou dans le sens inverse. Quelques éléments de distinctions sont à noter par rapport au texte publié au Soleil Noir.
Organisation et description des vignettes de comics
Les scènes découpées de comics alternent entre scènes érotiques/amoureuses (harem, scènes d’amour, intrigue autour d’un mariage) et violences (bondage, viol, agression, suicide), voire mêlent les deux : à la mesure de l’échange entre les textes, eux-mêmes découpés, réinstallés hors de toute logique.
Seule logique apparente : celle des vignettes mentionnant la réalisation du mariage (correspond à certaines thématiques chez Ghérasim Luca, autour de la question de la bague, de l’anneau, et du mariage des états de la matière dans le corps sensible).
La bande-dessinée est sûrement Bikini cat, n° 5, Du sang sur la mer, Ed. Poche, 130 x 180 mm, 128 pages, août 1972, en vente pour 2,00F.

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